dimanche 10 avril 2016, par .
Inspirée de canevas anciens, la pièce présente la fuite de soldats, recrutés sous le coup de l’ivresse. Un univers de guerre où le drame côtoie la farce. Sméraldine se languit de Polichinelle, son amoureux, pendant qu’elle trime chez Pantalone, archétype de la ploutocratie. Des Capitans fanfarons et stupides, des sorcières, des délateurs, des mendiants, les moines de l’Inquisition, tout un univers baroque se déploie sous nos yeux.
Pièce de France Kadah-Theys [1]
Il paraît que nous sommes en guerre. Ici, et maintenant. Mais nous avons choisi de parler de guerre avec la mise à distance des neiges d’Antan. Celle du combat des empereurs germaniques contre l’Eglise et le pape. Une guerre parfois violente, parfois larvée, qui aboutit à la Réforme. Le clergé à l’époque se livrait à la simonie : vendant des indulgences, comme autant de parcelles de paradis monnayables, et respectant fort peu le vœu de chasteté, mais par contre, donnant beau jeu à tous les fanatismes, avec ses tribunaux d’Inquisition, rompus aux pires cruautés.
Ainsi les trois piliers du pouvoir sont-ils présents dans la pièce : l’argent, dont Pantalone est le maître incontesté, l’armée, avec ses capitans ridicules, l’Eglise avec ses Inquisiteurs, ce qui montre que le fanatisme religieux a aussi été le fait du Christianisme. Et puis la guerre des paysans surgit dans plusieurs provinces germaniques, désavouée par Luther. Ce contexte me semblait parlant pour évoquer un univers en crise. Après avoir longuement fouillé l’iconographie, l’Histoire, les canevas, nous en avons tiré une fiction originale, ancrée dans la Renaissance.
Le travail aux masques, le décor, les jeux de scènes évoqueront l’univers pictural de Jacques Callot, ses chorégraphies loufoques et crues. Les excès de la farce et du burlesque, allant jusqu’au fantastique, puisqu’il nous faut un miracle pour sauver la mise de nos héros. La dénonciation de la violence emprunte les chemins du baroque : éclatement de l’intrigue, mélange des genres, théâtralité. Écoutons ce que dit un Arlequin de la comédie italienne en France, à cette époque :
« Qui dit bon comédien italien dit un homme qui a du fond, qui joue plus d’imagination que de mémoire, qui compose en jouant tout ce qu’il dit, qui sait seconder celui qui se trouve avec lui sur le théâtre, c’est à dire qu’il marie si bien ses actions à celles de son camarade, qu’il entre sur le champ dans tous les mouvements que l’autre lui demande, de manière à faire croire qu’ils s’étaient déjà concertés. »
Evariste Gherardi, avertissement au théâtre italien.
Cette part de jeu libre impliquera de notre part un travail important sur l’espace et ses limites, son orientation. Un travail où les acteurs apprennent la marche et les gestes de leur personnage, autant que leur texte, et sont leurs propres machinots. Cela repose sur une troupe qui a des années d’existence, même si elle intègre chaque année des nouveaux. La connivence résulte de ce vécu commun. C’est une part importante de cette alchimie.
Avec la nécessité d’une magie pour créer le miracle, et sa part de fantastique naïf, ce qui est tout à fait en harmonie avec les codes de ce théâtre.
Avec : Chuks Eziné, Armand Gorintin, Alan Güclü, Clément Jardon, France Kadah-Theys, Dominique Luccioni (à la régie), Noëlle Orlinski , Basile Pachkoff, Ratcékou, Elisa Pillière de Tanouarn, Marie-Anne Slimane.
[1] France Kadah-Theys a tour à tour adapté plusieurs canevas de Placido Adriani, commedia italienne, la Foire St Germain de Regnard (répertoire Gherardi) commedia dell’Arte française, La Vie est un Songe de Calderon de la Barca, primée au Festival Mai en scène à Drancy en 1999, et Fuente Ovejuna de Lope de Vega, œuvres majeures du siècle d’Or espagnol.
Elle a créé : L’Affaire Abraham et le Ferrailleur de la départementale, qui reçurent le prix Primo Levi à Bruxelles.
Plusieurs de ses pièces ont été créées par elle et reprises par d’autres troupes en province. Les jumeaux de Naples, créés dans le off Avignon, ont été repris à Lyon, il y a trois ans par le Théâtre des Asphodèles. Le texte, avec celui d’autres pièces pour enfants dont elle est l’auteur est publié chez Magnard.
Elle a encadré pendant quelques décennies ateliers et options théâtre, à Marne la Vallée, puis à Drancy, enseignant aussi à l’université de Paris 8, pendant 10 ans mais aussi des stages de jeu et de fabrication de masques en Île de France, et en région Midi-Provence. Elle crée les masques et marionnettes pour ses spectacles et aussi parfois pour ceux de l’Arbre sec (Montreuil).
Jeudi 19 mai 2016 21:00-23:00